Lettre hospitalière n° 2
Robert De la folie
6 juin 1985
Mes Bien Aimés Frères,
Nous exprimons ici notre gratitude au nom de tous ceux que nous avons pu aider l’hiver dernier. Généralement moins pénible qu’en hiver, la situation de déshérité est, d’une certaine manière plus flagrante à l’approche des beaux jours, tout particulièrement en cette fin de XXe siècle et dans pays industriels.
La Misère, dans le Monde Moderne, a peut-être en effet quelque chose en elle, de plus fondamentalement scandaleuse encore, que dans les siècles passés, car elle subsiste et s’amplifie malgré les moyens matériels et techniques gigantesques dont nos "civilisations" sont si fières, sans être capables de régler le si grave et dramatique problème de la pauvreté.
Il s’agit là, en fait, d’une aggravation considérable et continue, des paradoxes d’une société aberrante, qui crée d’immenses richesses, et développe une puissance colossale, avec une formidable technologie, multipliant en même temps, les richesses matérielles de l’ensemble humain et le nombre des exclus de cette prospérité.
Quelle que soit l’explication donnée, la cohabitation de l’Opulence et de la Misère est toujours indécente. Elle l’est plus encore aujourd’hui, alors que l’Abondance présente élimine les excuses et justifications (de toutes façons inexcusables et injustifiables) de la Rareté ancienne.
Mes Frères : Notre monde moderne règle son existence sur un certain mode de vie, lequel inclut des us et coutumes et parmi ceux-ci : les vacances. Il y a les exclus des vacances.
Comme il y a les exclus du Confort et de la Famille, de la Santé et de la Culture, des Sentiments et de l’Amitié... toutes sortes de catégories... déshérités permanents et facultatifs, pauvres nouveaux et anciens, malades, infirmes, incurables, déprimés, désespérés, délaissés, femmes opprimées, vieillards oubliés, laissés pour compte, enfants abandonnés, enfants martyrs, handicapés physique et psychique, isolés de tous âges, etc... ... ...
L’habitude des vacances semble inclure une autre habitude : celle d’"oublier" (individuellement ou collectivement) un grand nombre de nos frères humains, et avec eux d’ailleurs, nos frères différents animaux, nos plantes, nos pierres... rejetant toute forme de la Vie avec une égale indifférence.
C’est là une bien mauvaise habitude, et plus précisément une habitude criminelle ; une habitude criminelle qui remet en cause notre vocation humaine et notre véritable raison d’être.
Mes Chers Frères : à vous qui avez manifesté spontanément et magnifiquement votre sens social et spirituel, et qui, par là-même avez ajouté à l’acte généreux, l’exemple communicatif et bienfaisant, nous vous demandons de participer à cette nouvelle action de la Très Grande Charité Amicale Solidaire et Fraternelle des Vrais Maçons, qui désirent donner en remerciant ceux qui reçoivent, et qui, un jour donneront aussi, comme ils auront reçus.
Nous savons que l’attitude hospitalière, est celle de tout maçon, le frère hospitalier n’étant qu’un substitut, et que cette action s’exprime aussi bien sur le plan de l’aide morale et matérielle envers toute souffrance humaine et non humaine que sur le plan de l’action rituelle et spirituelle de nos travaux en loges, qui constituent, avec la transmission de l’incomparable message initiatique l’exposition, au sein d’un monde défiguré et dénaturé par lui-même, d’une communauté de Frères Libres et Egaux par la Grâce de la Céleste Amitié.
Robert de la folie
Vénérable Maître de la Céleste Amitié Hospitalier National de la Loge Nationale Française